Les PUC, interne ou externe
Voici une photo des deux composants d'une PUC ainsi que des radios d'une PUC interne, posée il y a plus de 15 ans. Le patin plastique blanc (en polyéthylène) est transparent sur la radio à l'exception du petit fil métallique qui permet de vérifier que la pièce est bien en place.
Voici les radios d'un genou opéré avec cette prothèse
Principe de la prothèse unicompartimentale interne ou externe (PUC)
Ce dessin est un calque de la radio du genou en position debout (la déformation est corrigée).
L'usure du cartilage entraine l'apparition d'un espace vide entre les deux os, qui se rapprochent et donc une augmentation de la déformation de la jambe (varus ou valgus). Les ligaments interne et externe sont intacts à ce stade.
Pour pouvoir mettre cette petite prothèse, il faut que la déformation soit réductible : le chirurgien en manipulant doucement votre jambe (aucune douleur), doit pouvoir remettre la jambe "droite"; il "réduit" la déformation.
C'est dans ce cas seulement que le chirurgien pourra introduire la petite prothèse dans l'espace entre les deux os, un peu comme une cale, en coupant le minimum d'os.
Si l'arthrose est plus évoluée, la rétraction des ligaments empêchera la réduction de la déformation. C'est une contre-indication absolue de la PUC.
Le principe de cette petite prothèse est donc de resurfacer le fémur avec la pièce adaptée, puis d'introduire une petite cale (la pièce tibiale) fixée sur le tibia.
Mais il ne faut pas corriger complètement la déformation pour que le genou reste en varus (ou en valgus) et que le poids du corps appuie sur la prothèse, épargnant ainsi l'autre compartiment du genou. L'épaisseur de la cale, de la prothèse, doit être un peu inférieure à l'espace entre les deux os (ici 10mm mesuré).
Facteurs favorisants de l'arthrose
Nous avons vu qu'une prothèse partielle ne peut se discuter, que si un seul compartiment du genou est usé (interne, externe ou rotulien). Dans quel cas, l'arthrose peut-elle être limitée à un seul compartiment ?
Le genu varum ou valgum
Au début, l'arthrose ne touche souvent que le compartiment sur lequel le ou la patiente s'appuie le plus en marchant (interne pour un varus, et ...). Il existe donc une période pendant laquelle les lésions sont localisées sur un seul compartiment.
Par la suite, l'arthrose va toucher un autre compartiment (externe, interne, ou rotulien) et nécessiter la pose d'une prothèse totale.
L'ablation d'une partie du ménisque (méniscectomie même partielle)
Une ablation d'une partie du ménisque interne sera responsable d'une usure plus rapide du compartiment interne, en général une vingtaine d'années après (idem pour le ménisque externe).
L'utilisation de l'arthroscopie a certes permis de limiter la méniscectomie en réduisant l'ablation à la languette gènante sans chercher à régulariser toute la partie abimée.
Notez que la suture méniscale doit toujours être tentée chez le sujet jeune pour permettre une possible cicatrisation.
La greffe de ménisque pour remplacer le ménisque enlevé, reste réservée à des cas très particuliers chez des sujets très jeunes et c'est une technique en cours d'élaboration.
La rupture du ligament croisé antérieur
Elle génère une instabilité chronique, si les sports à pivot sont poursuivis; cette instabilité entraîne des dégats cartilagineux et méniscaux, avec un risque d'arthrose prématurée. C'est la raison pour laquelle il est logique de reconstruire le ligament croisé antérieur chez le sujet jeune d'une part, et chez le sportif qui veut reprendre un sport à pivot (foot, hand, rugby,...)
Mais la prothèse partielle, uni-compartimentale est contre indiquée si ce ligament est rompu. +++
On pourra alors discuter selon l'âge et l'état du genou :
- Soit le traitement médical de l'arthrose
- Soit la reconstruction du ligament croisé antérieur, suivi de la pose d'une petite prothèse,
- Soit une ostéotomie avec ou sans geste ligamentaire
- Soit une prothèse totale
La fracture d'un plateau tibial
Cette fracture est liée à une prise d'appui brutal sur le pied, avec enfoncement du plateau tibial (le plus souvent externe) par le fémur du patient. Il peut s'agir d'un accident de ski.
L'objectif de la chirurgie est de "remonter" le fragment osseux enfoncé, souvent d'ailleurs, en insérant une greffe d'os sous le fragment, et en le fixant par des vis ou une plaque vissée.
Même si "l'os" est très bien opéré, cette fracture entraine toujours des lésions du cartilage (chondropathies) situé sur le pavé osseux enfoncé et autour de lui. Le chirurgien n'a pas d'action directe sur le cartilage.
Cet impaction résiduelle du plateau tibial externe peut aussi modifier l'axe du membre inférieur : en aggravant un valgus pré-existant (jambes en X) ou en diminuant un varus (jambes arquées).
Avantages de la "PUC"
Hospitalisation d'une journée : en ambulatoire
Si vous le désirez, l'intervention peut se faire dans la journée en ambulatoire, si l'anesthésiste est ok. Vous rentrez le matin pour sortir le soir même. L'intervention entraine moins de pertes sanguines que la prothèse totale, ce qui permet votre sortie le jour même.
Vous marchez le soir même
Le genou est un peu gonflé et douloureux, vous commencez vos exercices dès le réveil. Le kiné vous accompagnera pour faire vos premiers pas en verrouillant bien votre genou et en prendre appui dessus. Notez que le principe est le même après une prothèse totale.
Rééducation facile
Ce mélange d'auto-rééducation et de coaching par un kiné vous permet de progresser tranquillement en évitant absolument de forcer et de rendre le genou douloureux.
Objectif : vie quotidienne normale
Il est normalement possible de retrouver une vie quotidienne correcte au bout de 5-6 semaines, La descente normale des escaliers étant souvent encore difficile à ce stade.
Reprise des activités physiques
La reprise doit être très progressive pour éviter l'apparition de douleurs, qui gâcheraient le résultat. La patience sera de mise. Certaines activités sont à proscrire comme les sauts : toute réception brutale sur le pied risque de desceller la pièce tibiale.
J'ai "oublié" ma prothèse
C'est une possibilité mais ce n'est pas sûr. Là encore, l'important est d'aller mieux. Une étude de 2017 sur la satisfaction des patients montraient qu'un patient déçu trois semaines après l'opération risquait plus de rester déçu tandis que le patient satisfait d'avoir été opéré à ce stade continuait à s'améliorer avec le temps. Il vaut mieux découvrir petit à petit les progrès; c'est ce qui marche le mieux.
Sa durée de vie est limitée
La durée de vie d'une prothèse se mesure de sa pose à son changement. Elle peut être plus courte (environ 10 ans) que la prothèse totale et cela d'autant plus que le patient sera jeune et actif, ou sportif.
Il est difficile de dire actuellement qu'une prothèse unicompartimentale durera plus de 10-15 ans. Sa durée de vie peut aller de quelques années (5) à plus de 25 ans. Mais pour le patient qui se renseigne avant de se faire opérer, il faut attirer son attention sur ce problème. Le risque de complication explique cette survie limitée.
Quels sont les critères de décision ?
Pour que le résultat soit satisfaisant pour le ou la patiente, il faut respecter des critères précis.
Voici une radio montrant un pincement isolé incomplet du compartiment interne sur un tibia (sans varus épiphysaire) qui semble a priori être une bonne indication de petite prothèse; mais le ou la patiente est-elle suffisamment génée pour se faire opérer ?
Cohérence entre la localisation des douleurs et du pincement radiologique.
Etre sûr que les douleurs ressenties par le patient soient liées au compartiment usé, par une étude fine de ses symptomes et un examen clinique rigoureux.
L'échec est garanti si une prothèse unicompartimentale interne (ou externe) est posée chez un patient présentant des douleurs antérieures rotuliennes.
Les douleurs ressenties doivent être cohérentes avec le pincement radio.
La déformation doit être réductible ?
C'est-à-dire que l'on puisse redresser la jambe, et donc corriger la déformation; ceci permet d'envisager la prothèse partielle, car il sera possible de l'insérer dans l'espace disponible entre les deux os. La déformation n'est pas réductible si les ligaments sont rétractés.
Intégrité des ligaments
Les ligaments latéraux sont indispensables pour envisager la pose d'une prothèse unicompartimentale interne ou externe.
Le ligament croisé antérieur : la rupture de ce ligament contre-indique sa pose, car le mouvement de tiroir entraine une usure prématurée de la pièce tibiale en polyéthylène.
Intégrité des autres compartiments
Les autres compartiments du genou doivent être quasiment intacts et non douloureux. Ceci se vérifie sur les radios et sur les clichés en position "forcée" : en varus et valgus forcés. Cela permet de vérifier l'épaisseur de l'autre compartiment, la souplesse du ligament du côté de l'usure (la déformation est réductible) et la "non-distension" du ligament opposé suite à la déformation.
Le compartiment fémoro-patellaire, rotulien, doit être intact et non douloureux, nous l'avons vu..
Mobilité normale ou presque
- Une Flexion autour de 120-130°
- Une extension normale : un flessum pré-opératoire (perte de l'extension complète) ne peut pas être corrigé lors de la pose de ces petites prothèses.
Le poids
Un poids supérieur à 90 kgs est une contre-indication, car le risque d'enfoncement du tibia et ou de fracture du tibia est proportionnel au poids. Mieux vaut dans ce cas, une prothèse totale où le poids du patient est réparti sur toute la surface tibiale.
L'ostéoporose
Un os peu solide risque plus facilement de se fracturer ou de s'enfoncer après une petite prothèse. Une densitométrie osseuse est logique chez la femme, en pré-opératoire.
Le degré d'usure
Si l'on parle de poser une prothèse unicompartimentale, c'est que l'arthrose est évoluée : le pincement de l'interligne doit être net. Le genou peut même être "os sur os" mais l'autre compartiment doit être intact.
L'âge du patient
Cette prothèse est discutée chez un ou une patiente autour de 50 ans. Parfois, pour des raisons médicales, elle peut se discuter chez un patient beaucoup plus agé, qui aurait plus de mal à supporter la pose d'une prothèse totale, où la perte sanguine est potentiellement plus importante.
En général, je préfère mettre une prothèse totale chez les personnes agées, qui peuvent la supporter (ce qui est pratiquement toujours le cas). Si elle est bien posée, elle ne nécessitera pas de reprise, en général.
Pouquoi met-on peu de prothèses unicompartimentales ?
Mais pourquoi ne pas poser une petite prothèse dès le début des symptomes, plutôt que d'attendre que le genou soit plus usé ?
En pratique, lorsque le genou remplit les critères ci-dessus, le patient ou la patiente, souvent jeune, n'est pas forcément suffisament génée et préfère souvent le traitement médical.
Le premier frein à la décision est probablement la durée de vie plus courte de cette demi-prothèse. On parle de plus ou moins 10 ans, même si on a tous des dossiers de patients qui l'ont gardé beaucoup plus longtemps (+ de 20 ans de recul sur la radio ci-contre).
Technique de pose
La programmation pré-opératoire
Nous avons vu ci-dessus le calque pré-opératoire. Il est très important car le risque opératoire de cette prothèse est de trop "remplir" le compartiment usé.
Une cale trop importante entraînera une hypercorrection : un genou usé en interne par exemple (en varus donc), risque d'être en valgus après l'opération.
Le genou ne va donc pas s'appuyer sur la prothèse, mais sur l'autre côté qui était sain (externe dans notre exemple). Les suites risquent d'être difficiles d'une part et l'autre compartiment va s'user, puisqu'il sera mis en charge. Ce sera probablement une cause de reprise.
L'incision, la cicatrice
L'incision et donc la cicatrice, est centrée sur le compartiment usé. Elle est donc plus petite que pour une prothèse totale. La chirurgie "mini-invasive" a été très à la mode ces dernières années. C'était à celui qui ferait les plus petites incisions. Il est vrai que c'est une démarche très importante pour la chirurgie méniscale ou ligamentaire et l'arthoscopie a permis des progrès énorme en raccourcissant les suites.
Pour la pose d'une prothèse, nous sommes beaucoup à penser qu'il vaut mieux une prothèse bien posée qu'une petite incision... Plus petite que pour une prothèse totale bien sûr, mais pas trop.
Les coupes osseuses
Elles sont faites avec des guides de coupe osseuse (l'ancillaire), qui permettent, avec l'expérience, de la poser très correctement.
En résumé
La pose repose sur l'utilisation du matériel ancillaire fourni par le fabricant et l'expérience du chirurgien.
Certains se sont passionés pour l'utilisation du robot, qui est sûrement une technique d'avenir, mais qui reste actuellement, en cours d'étude. L'utilisation des guides sur mesure est intéressante, mais elle est moins fréquente que pour la prothèse totale.
Les complications
Ce sont les complications de la chirurgie en général, associées aux complications des prothèses et à celles spécifiques à la petite prothèse. Vous pouvez retrouver les complications des prothèses en général et dans les textes remis en consultation.
Persistance des douleurs
C'est le résultat d'une mauvaise analyse des douleurs préopératoires du patient ou l'aggravation de douleurs rotuliennes pré-existantes ou non, liées à une rééducation forcée.
Le risque de descellement
La prothèse unicompartimentale étant posée chez des patients plus jeunes, il est évident que le risque de mobilisation des pièces de la prothèse (en particulier tibiale) est plus important que pour une prothèse totale. Il peut nécessiter une reprise par prothèse totale.
C'est pourquoi il faut éviter les sauts et les réceptions brutales sur le pied.
L'usure du patin en polyéthylène
Très rare sur une prothèse totale bien posée, elle est possible chez des patients sportifs et nécessitera une reprise
L'usure des autres compartiments
L'érosion du cartilage continue sur les autres compartiments du genou et peut nécessiter de changer la petite prothèse par une prothèse totale. C'est pourquoi il est important de ne pas corriger complètement la déformation pour que le poids du corps à la marche reste en appui sur la petite prothèse.
Ces trois complications explique la durée de vie plus limitée de cette prothèse.
L'infection
Le risque est à peu près le même que pour une prothèse totale.
Que peut-on faire en cas d'échec ?
Voici les radios de face et de profil d'une prothèse unicompartimentale interne (PUCI), 12 ans après sa pose. La pièce tibiale n'a pas résisté à la pression de la pièce fémorale et elle s'est descellée et enfoncée dans le tibia en s'obliquant. La déformation de la jambe s'est accentuée.
La prothèse unicompartimentale descellée ou usée peut être changée pour une prothèse totale. La pose est un peu plus complexe et nécessite souvent une greffe osseuse, des tiges longues,... mais cela reste une intervention qui fonctionne.
Rassurez-vous : elle restera toujours possible.