Cartilage, Chondropathie et Arthrose du genou
Mise à jour le 9 octobre 2024
Cette page, écrite par le docteur Perraudin, se concentre sur l'évolution du cartilage avec le temps, de la chondropathie localisée à l'arthrose, en utilisaant des images.
Le cartilage recouvre l'os dans l'articulation et le protège. Son usure progressive entraine des modifications de surface, appelées "chondropathies". Ces chondropathies superficielles au début, vont s'accentuer avec le temps, et le cartilage disparait progressivement donnant l'arthrose.
Qu'est-ce que le cartilage ?
Le cartilage est un tissu résistant mais élastique et souple qui recouvre la surface de chaque os dans une articulation.
Son rôle est d'amortir les chocs et de protéger l'os sous-jacent. Il n'est pas innervé.
Avasculaire, le cartilage est nourri par imbibition et diffusion des nutriments présents dans le liquide articulaire.
Le cartilage est-il innervé ?
Non, le cartilage n'est pas innervé (ni le ménisque d'ailleurs); il n'est donc pas responsable de douleurs. Les douleurs ressenties sont liées à l'innervation de l'os situé sous le cartilage (appelé "os sous-chondral".
Coupe d'une articulation et vue du cartilage sous arthroscopie
Pour mieux comprendre, regardez cette coupe d'une articulation : l'os est brun et le cartilage blanc. Les deux cartilages glissent l'un sur l'autre lors des mouvements de l'articulation.
La chondropathie correspond à l'usure superficielle et localisée du cartilage. L'arthrose correspond à la disparition du cartilage, donc de cette zone blanche entre les deux os.
Cette photo est prise lors d'une arthroscopie réalisée pour reconstruire un ligament croisé : un tunnel a été créé dans l'os. On peut voir l'os qui borde le tunnel, et le cartilage normal qui le recouvre.
La RADIO pour voir l'épaisseur de cartilage.
Sur cette radio de la rotule, la flèche jaune montre l'espace (que l'on nomme "interligne") entre le fémur en bas et la rotule en haut; l'interligne est d'épaisseur normale: il n'y a pas d'arthrose.
Cette radio en charge (le patient est debout), montre un interligne articulaire d'épaisseur normale.On peut noter que l'épaisseur est moindre à droite : ce patient appuie plus sur ce côté lorsqu'il est debout. C'est la conséquence de la forme de ses jambes (ici, arquées, en varus).
L'IRM pour voir les chondropathies.
Ici le cartilage est normal en arthroscopie et sur l'IRM.
De la chondropathie à l'arthrose
Qu'est-ce que la chondropathie ?
La chondropathie est donc une modification, superficielle au début, du revêtement cartilagineux; elle est localisée et passe par différents stades : un peu mou au début (chondromalacie, stade 1), puis "ouverte" avec quelques fissures (stade 2, décrite comme chondropathie ouverte superficielle, fibrillaire , pelucheuse , velvétique... puis aspect chevelu en chair de crabe ou en clapet (stade 3) et enfin dénudé, os à nu (stade 4).
Le diagnostic de chondropathie
Le diagnostic se fait essentiellement par une IRM. L'arthroscanner est un examen encore plus précis qui n'a d'intéret que dans les très rares cas où se discute un indication opératoire.
Evolution avec le temps
L'évolution des chondropathies est très lente, très variable suivant les individus, la forme de leurs membres inférieurs (en X ou arquées), les sports pratiqués, leur poids, les accidents... Elle peut apparaître très tôt dans la vie, sans pour autant être responsable de douleurs.
Certaines situations sont connues comme accélérant l'usure, dites "arthrogènes", comme une instabilité du genou après rupture ancienne du ligament croisé antérieur ou après une méniscectomie (ablation d'un fragment méniscal).
En dehors de ces cas particuliers, lésions sont très progressives en importance et en étendue; il peut coexister des lésions de stades différents sur une même surface cartilagineuse.
Localisation
La chondropathie est localisée sur le cartilage d'un seul os; elle peut être importante sur un os alors qu'il n'y a rien en face sur l'autre (pas d'usure en "miroir").
Les chondropathies sont donc classées en fonction de leur profondeur, de leur étendue et de leur localisation sur l'IRM, ou sous arthroscopie.
Sous arthroscopie
Cette image arthroscopique, où l'on peut voir en haut la rotule et en bas le fémur, est l'équivalent de la radio vue plus haut. En arthroscopie, l'espace entre les deux cartilages est ici dû au liquide (sérum physilogique) dont l'articulation est remplie pour l'opération; dans la réalité (hors arthroscopie), la rotule prend appui et glisse sur le fémur.
Sur l'image, vous pouvez voir que le cartilage n'est pas lisse en haut, sur la rotule : c'est la chondropathie. Ces petits filaments sont très fins et souples; ils ne gènent pas le glissement des cartilages l'un sur l'autre. Le crochet vu sous arthroscopie ne fait que 3 mm de long... De plus, cet image chevelue ne signifie pas que le patient est douloureux, ni que cette chondropathie soit à l'origine des douleurs.
La profondeur
Sur cette autre image arthroscopique , voici une chondropathie stade 4 très localisée sur le fémur, découverte lors d'une arthroscopie pour une reconstruction du ligament croisé antérieur. Vous noterez que le cartilage tibial en dessous est pratiquement normal. Le patient ne ressentait aucune douleur en rapport avec cette lésion, au moment de l'opération du ligament.
Les chondropathies entrainent-elles toujours des douleurs ?
Les chondropathies rotuliennes
Les chondropathies "rotuliennes" sont presque banales, tellement elles sont fréquentes. Elles sont le plus souvent découvertes à l'occasion d'une IRM : le radiologue les décrit avec précision et intensité (et l'on prend souvent 10 ans à lire le compte-rendu...).
Mais la présence de la chondropathie ne veut pas dire qu'elle est responsable des douleurs ressenties par le patient : en vieillissant, nous avons tous des chondropathies et nous sommes beaucoup à ne pas avoir mal au genou... A l'inverse, la jeune fille de 15 ans peut avoir le cartilage de sa rotule douloureux et l'IRM ne retrouve rien.
Il n'y a que peu de parallèlisme entre le degré de chondropathie en particulier rotulienne, et l'intensité des douleurs. La douleur rotulienne est d'ailleurs plutôt une douleur "fonctionnelle" au repos après l'effort, tandis qu'une chondropathie entre fémur et tibia entrainera plutôt une douleur "mécanique", à l'appui.
Les chondropathies entre fémur et tibia
C'est le début de l'arthrose et elles peuvent causer des douleurs à la marche.
Existe-t'il un traitement spécifique de ces chondropathies ?
Autrefois, aux débuts de l'arthroscopie, on avait cru que nettoyer ces "cheveux", régulariser la surface cartilagineuse, permettrait d'améliorer les douleurs du patient ou les sensations de blocage. Il n'en est rien la plupart du temps.
La responsabilité des chondropathies
Avant tout traitement, il faut d'abord confirmer la responsabilité des chondropathies dans les douleurs ressenties par le patient, ce qui est loin d'être souvent le cas. L'IRM est le plus souvent réalisée pour confirmer ou éliminer une lésion mobile d'un ménisque
Le traitement est d'abord médical
Il s'agit de traiter les douleurs ressenties et apprendre à gérer son genou.
La perte de poids est un outil très important de ce traitement médical.
Blocages
Il peut arriver que devant des épisodes de blocages, on "suspecte" la responsabilité d'un fragment cartilagineux. Ici encore, le traitement médical et d'éventuelles infiltrations permettent le plus souvent de traiter les symptomes et de laisser passer l'orage : ce qui montre bien l'absence de responsabilité de la lésion.
La résection d'un clapet cartilagineux ou sa fixation reste exceptionnelle. Le patient doit être prévenu de la faible probabilité d'amélioration après la chirurgie.
Vous trouverez des conseils sur cette page si votre genou se bloque.
Les lésions profondes localisées
Pour une information plus complète, je cite ces interventions mais leur indication reste très rare.
Ce sont les stade 4 localisés comme sur l'image. Ici, il est "possible d'envisager" de faire une greffe de cartilage. Il s'agit de prélever une "carotte" d'os et de cartilage dans une zone saine du genou du patient; un trou est foré au niveau de la zone usée et la carotte prélevée est insérée en force dans le trou. Ce geste relativement simple, n'a pas donné les résultats escomptés pour de multiples raisons. Mais il reste utile pour des genoux très abimés chez un jeune dans les suites d'un accident par exemple.
Usure localisée du compartiment interne
Si la lésion est localisée sur la partie interne d'un genou en varus (jambe arquée), il est aussi possible de réaliser, si le traitement médical ne suffit pas, une ostéotomie de valgisation pour ré-axer le membre et ainsi transférer le poids sur le compartiment sain (ici externe).
Peut-on prévenir l'aggravation des chondropathies ?
Maigrir est fondamental
La perte de quelques kilos en préférant une alimentation plus équilibrée, peut être très bénéfique. Se faire aider par un(e) diététicien(ne) parait être une excellente idée.
Eviter l'ablation d'une partie du ménisque
Cette opération, souvent très utile, ne doit être réalisée que si la lésion est une languette mobile (IRM) et si tous les symptomes sont cohérents avec ce diagnostic. Une suture du fragment doit toujours être envisagée, surtout chez les jeunes.
Mais l'ablation (inutile !) d'une fissure méniscale dégénérative semble aggraver l'usure du cartilage.
Opérer les ruptures du ligament croisé antérieur
Indispensable chez les jeunes, l'opération reste nécessaire quel que soit l'âge, si le genou devient instable par la suite.
L'arthrose
Beaucoup plus tard dans la vie, la chondropathie peut évoluer vers l'arthrose